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Une réponse à l’injonction contradictoire du Baron de Coubertin

Ce billet fait partie des "fondamentaux" de Codezero. Il a été initialement publié en 2014, il aborde la différence culturelle entre les sports traditionnels et ce que nous nommons ici les sports alternatifs ou libres. Et illustre un point de vue japonais.

Le 24 juillet 1908, Le Baron de Coubertin prononce un discours dans lequel il reprend, la maxime de l’évêque anglican de Pennsylvanie : « L’important dans ces Olympiades, c’est moins d’y gagner que d’y prendre part ». La phrase, sous une autre forme, « L’essentiel est de participer » est devenue une vérité répétée à l’envie, alors même que le sport traditionnel et son culte de l’excellence (la question des dégâts collatéraux de cette vision pyramidale est posée) va bien en sens contraire en ne retenant au mieux que les trois premiers et en broyant allègrement les autres. 

La compétition a été érigée en modèle absolu de la pratique sportive, horizon et raison d’être du geste, mais des voix contraires se font entendre depuis des années. Celle de Stéphane Proia par exemple, auteur de La face obscure de l’élitisme sportif et de Corps machine.

Dans un autre registre, les sports « alternatifs » ont montré depuis leur émergence qu’une « pratique » peut d’une part dépasser le simple cadre de l’exercice physique, notamment par sa dimension existentielle ou philosophique et d’autre part, et tourner le dos à la compétition justement pour les mêmes raisons. C’est un changement fondamental dans la façon d’appréhender le sport. 

C’est le propos de ce film de Keita Ikawa projeté au Byron Bay Surf Festival il y a plusieurs années. La compétition et l’élitisme sportif sont des modèles qu’il est temps  de remettre en cause, tout au moins peut-on commencer par prendre nos distances et dire qu’il existe d’autres façons d’envisager, de promouvoir et de pratiquer le sport. Cette évidence est pourtant peu envisagée par les institutions toujours prompt à magnifier l’idéal olympique même quad il sombre. Comme à Pékin aujourd’hui.

En 2013, Albert Jacquard, chercheur et essayiste français bien connu, décédé très récemment, répondait aux question de Sud Ouest qui lui demandait  :

« Quelle distinction faites-vous entre compétition et émulation ? »

« La compétition, c’est « je ». Je cours contre vous, vous courez plus vite que moi. Cela me désole. Comme je veux arriver premier, j’en prends tous les moyens, y compris la tricherie. C’est cela, la compétition. C’est vouloir l’emporter sur l’autre, ce que fait presque sans y penser la société d’aujourd’hui.

L’émulation, c’est je cours avec vous, vous arrivez plus vite que moi et loin d’en être désolé, j’en suis tout heureux car vous avez des leçons à me donner sur ma façon de courir. L’émulation, c’est être content d’être dépassé par l’autre dans l’espoir qu’il vous ouvre des possibilités nouvelles. C’est l’exact opposé de la compétition.

Tout le reste découle de cette distinction. Ce que je cherche, ce n’est pas d’être meilleur que l’autre, ce qui n’a aucun intérêt, mais d’être meilleur que moi-même, ce qui est merveilleux. »

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