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Think Tank : Ultra trail, triathlon, Swimrun… effort au long cours. Pourquoi ?

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Il faut remonter aux années 60 pour bien comprendre que les grosses évolutions sociétales ont transformées, métamorphosées, étendues l’univers sportif. Le bien être, la réalisation personnelle, la recherche de la sensation et finalement la quête de la liberté deviennent des nouvelles motivations sportives. Le désir remplace la domination ou tout du moins devient une alternative, une autre façon de « vivre » le sport. Comme nous l’écrivions en paraphrasant Philippe Fabry dans sa fiche de lecture du libre d’Alain Erhenberg, le culte de la performance. « Dès lors, la question existentielle pour le sportif n’est plus ce qu’il lui est permis de faire, mais ce qu’il lui est possible de vivre. C’est le déclin de la discipline au profit de l’autonomie».

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Dans ce contexte parler d’ultra trail, de triathlons ou autre Swinrun peut paraître étonnant, voire contradictoire. Pas tant qu’il n’y parait.

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C’est bien à la recherche d’une expérience personnelle que partent par milliers les participants à ces nouvelles formes de course qui si elles aboutissent à un classement, n’ont pas comme vocation première de dessiner une hiérarchie. Franck Oddoux, journaliste spécialisé a eu comme les chats, au moins neuf vies. Skieur, montagnard dans l’âme, moniteur de ski puis testeur pour la presse spécialisée, windsurfer, fin observateur du secteur de l’outdoor et notamment des courses d’endurance, tête pensante du très beau magazine Spirit Outdoor, photographe talentueux, il est aujourd’hui rédacteur en chef de Test4outside, média web sur le matériel…. outdoor. Il n’y a pas de coïncidence. Dans son « Discours sur les efforts au long cours », Franck nous explique les ressorts de la course. Ne vous y trompez pas, c’est dans le vécu qu’il va puiser ce texte.

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Discours sur l’effort au long cours

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Par Franck Oddoux

Il fut un temps où l’homme courait après le mammouth car il avait un besoin impérieux de protéines. De nos jours, il court pour rien et mange des barres protéinées industrielles.

Les lignes de départ des épreuves d’endurance sont devenues des grand-messes où l’on n’y célèbre pas seulement le corps…

Les corps, justement, moulés par les combinaisons de natation, en ce petit matin de juin, sur le triathlon du mont Ventoux sont tirés d’un inventaire à la Prévert : des affûtés, des jeunes, des (très vieux qui n’arriveront pas forcément derrière…), des gros, des petits, des quadras sûrs de leurs coups et des inquiets qui se demandent ce qui leur a pris de s’inscrire à un half iron man. Flagellation ou inconscience ?

Il faut déjà avoir eu la chance d’avoir un dossard, puis de le payer (cher). Pendant des mois, en amont, il a fallu se réfugier dans sa bulle d’entraînement, ce que les médias n’appellent pas encore « l’autisme du sportif d’endurance » : peu de temps pour la vie familiale (première séance training à 6 heures de matin…), soirées avec des amis en pointillé, car on-ne-peut-plus-boire-et-il-faut-se-coucher-tôt, croyance en une alimentation de performance faisant appel à des principes monastiques, négation des plaisirs régressifs de la table… La mise « en bulle » du coureur au long cours commence bien avant le franchissement de la ligne de départ. Cet isolationnisme fait pourtant recette dans tous les pays occidentaux. Ce besoin de se mouvoir, en compétition, est désormais un marqueur sociétal. Ces millions de personnes qui redécouvrent qu’elles ont deux jambes et une paire de poumons ne sont pas un potentiel pour la psychiatrie même si parfois la pratique peut flirter avec la profondeur d’une analyse.

Sur les tables de chevet, d’autres Bibles sont apparues, comme la déflagration mondiale « Born to run » (1) de Christopher McDougall qui raconte la pureté d’âme et de foulée des indiens Tarahumaras capables de courir des jours entiers dans les Copper Canyons, en sandales, avec une simple poignée de farine de maïs… Ou le best-seller de Scott Jurek (2), ultra trailer qui prône l’ascétisme alimentaire, qui en a converti plus d’un à la vague végan.

La question, à un moment ou un autre surgi comme une fulgurance : «que suis-je venu chercher dans cette course où les limites entre le plaisir et la souffrance sont perméables ?». Mieux vaut qu’elle n’apparaisse pas en plein effort, c’est la pointe de l’iceberg de la faiblesse, le début d’un abandon. La réponse est polymorphe, nécessairement fausse, car liée à l’histoire de chaque sportif et au moment où on la considère.

À l’heure où l’on ne rêve plus de marcher sur la Lune, on marche devant soi et pour soi. L’époque dont le sens s’est dilué de manière insidieuse et homéopathique ne donne plus de direction : le désir d’accomplissement personnel, la grande purge intérieure (détox ?) mènent tout droit à l’introspection. Les endomorphines qui inondent le corps du coureur de fond sont les meilleures alliées du retour sur soi, d’une boucle rétroactive, d’une mise en abîme. Quand on est dans le « dur », expression consacrée des endurants qui souffrent pendant une épreuve, il faut se mettre dans sa bulle, couper ses perceptions extérieures et tenter d’échapper à ce corps « expression de douleur ». On peut (on doit) arriver à un état proche de la méditation, s’affranchir presque de la gravité et côtoyer des instants de grâce qui ne durent malheureusement jamais. Une insoutenable légèreté de l’être qu’Alain Loret, auteur/observateur avisé de nos pratiques sportives avait décrit comme syndrome de Peter Pan dans son ouvrage Génération glisse (3).

Les sports d’endurance peuvent froisser l’ouvrage d’Henry Laborit (4), « Éloge de la fuite », car ils sont au contraire des retrouvailles. Des fuites sociales ponctuelles, mais des retrouvailles avec son Moi malmené par une vie au fond des métros, des trajectoires personnelles plus ou moins maîtrisées, des désirs qui affligent… On court, on souffle pour se refaire un brin de virginité. Comme dans les films d’Hitchcock, on se donne un but chimérique à atteindre, ce que le célèbre réalisateur appelait le MacGuffin (4) : dans les films c’est une hypothétique bombe atomique à désamorcer, une carte au trésor enfouie ; en trail running, c’est le t-shirt finisher. Vacuité, fatuité, on peut appeler ça comme on veut, de loin. Mais on se méfiera des jugements à l’emporte-pièce. Chacun cherche son Graal, c’est un droit, une liberté.

Les efforts longue distance ne sont ni de l’hédonisme (il faut bien se l’avouer, on souffre) ni de l’aventure (quoi de plus balisé qu’une course organisée ?). C’est un précipice dans lequel on a décidé de tomber lentement, pour voir si l’on peut mieux se relever. Une sorte de mise en suspens, on retrouve la notion de cinéma, son cinéma, on joue des scénarios. C’est le temps personnel d’être face à soi. Un mano à mano qui doit bien se finir, c’est sans doute la raison pour laquelle on re-signe pour un autre marathon après avoir juré ses mille dieux que l’on ne recommencera jamais une telle bêtise. Il nous a fallu de multiples compétitions longues, pour comprendre que courir n’est pas une accélération, mais au contraire un ralentissement du temps. Paul Virilio (5), défenseur du freinage du temps, met en évidence les conséquences de l’accélération du monde, de la fuite des aiguilles. Le coureur littéralement « prend son rythme », sort du temps, gomme le passé, évite le futur pour réactiver la puissance de l’instant présent. Le « bushido » japonais n’est pas très loin, ce code moral Samouraï qui exalte le moment. On s’engage dans un processus créatif de son propre corps, hic et nunc. Le mouvement comme freinage. Le monde s’agite et l’on passe en slow motion. Égocentrisme. Les efforts longs sont des réductions, comme en cuisine, des moments où l’esprit même d’un ingrédient s’épanouit, prend force, se concentre, prend de l’épaisseur. « On disparaît de soi » pour mieux réapparaître. Phénix ? Il faut lire l’ouvrage totémique de David Le Breton, Disparaître de soi (6). S’éloigner pour retrouver du sens. Aller à l’os pour se réinventer. Les épreuves de longues distances changent une vie. À ce titre, elles sont d’un magnétisme incontournable pour nos civilisations sédentaires acidifiées par l‘ennui et le stress : que l’on s’attende à des déferlantes de marathons, ultra trails, triathlons… L’avenir est aux véhicules électriques et aux chaussures de running. Deux histoires d’énergies.

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  1. Born to run » de Christopher McDougall, éditions Paulsen.
  2. Eat and Run, Scott Jurek, éditions Guérin
  3. Génération glisse, Alain Moret, éditions Autrement.
  4. MacGuffin, in Hitchcock Truffaut, éditions Gallimard.
  5. Eloge de la fuite, Henri Laborit, éditions Gallimard.
  6. Vitesse et Politique, Paul Virilio, essai sur la dromologie, éditions Galilée.
  7. Disparaître de soi, une tentation contemporaine, David Le Breton, éditions Métaillé.

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