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Presse, artisanat et imaginaires du vélo

Parmi les débats qui agitent la presse depuis une bonne quinzaine d’années, le sujet brûlant reste le choc entre l’édition papier et le web. Tournant incontournable de l’histoire des médias. Le thème est beaucoup plus délicat qu’on ne le pense et de notre point de vue, ne se limite pas à la structure, c’est à dire au moyen de diffusion. En ce qui concerne la presse spécialisée, les raisons de la baisse de l’audience étaient et sont toujours autant du à un bouleversement sans précédent de l’offre qu’à l’absence totale de remise en cause de trop nombreux titres,  incapables d’imaginer que leur lectorat avait changé, évolué, qu’il fallait bien plus qu’une « nouvelle formule » pour inverser la courbe.

C’était et c’est toujours sur le terrain des idées, du « contenu », de l’imagination qu’il fallait se battre. Certains ont réussi. De nombreuses initiatives ont rencontré leur lectorat même si les diffusions n’ont sans doute plus rien à voir avec ce que l’on pouvait espérer à l’âge d’or de la presse papier. C’est en ce sens où un magazine se rapproche aujourd’hui d’un travail « artisanal » et c’est bon signe. Il faut aussi y voir un lien plus direct, plus sensible, plus proche entre la revue et ses lecteurs. La proximité ne s’invente pas, on ne triche plus.

Le « magazine sensible », 200, fait partie de ces nouveaux objets éditoriaux. On pourrait également citer Moto Heroes, Auto Heroes, Running Heroes Society, dans un autre domaine Usbek & Rica, Socialter, We Demain, ou les Mooks comme XXI, 6 mois, America, la liste n’est pas exhaustive.

La baseline de 200 est « Le vélo de route autrement ». Tourner les pages vaut le détour. Yann Kernichon cite Hegel (Phénoménologie de l’esprit) et Fukuyama (Le fin de l’histoire et le dernier homme- dans une chronique pleine… d’esprit, Alain Puiseux refait la route du Hussard sur le toit mais à vélo cette fois-ci, y consacre 14 pages, à l’heure du contenu segmenté – lorsque c’est bien écrit et c’est le cas – c’est du caviar. On y croise aussi un fabricant de cadres, un couple qui réinvente la selle en cuir, on découvre aussi l’histoire de cet homme, Luc Royer, qui voulait être guide de haute montagne, et qui crée un jour Chilkoot, la compagnie des pionniers, qui invente le grand cyclisme pour emmener ses clients dans les grands espaces. On part aussi à Coppenhague pour tenter de comprendre pourquoi 40% des déplacement se font en vélo et comment réinventer la ville.

« Les belles idées sont aussi une élégance » écrit dans un sujet Alain Puisieux créateur de 200. C’est tout à fait ça. 200 est un magazine précieux parce qu’il concoure à réécrire l’histoire du vélo, à en extraire sa substance poétique. Le vélo se réinvente sans cesse, il va bien au delà du culte de l’effort avec lequel on nous assomme depuis des lustres. Il y a aujourd’hui de nouveaux imaginaires du vélo : le fixie, le commuter, la révolution du vélo électrique bien sûr, le vélo cargo, le gravel, le BMX qui mérite bien plus que ce que la fédération et la culture français en a faite, et le VTT évidemment, que l’arrivée de l’assistance électrique va complètement remodeler.

Le vélo est un jeu et un enjeu de société et 200 un magazine pour la tête et les jambes. C’est comme ça que nous concevons aussi le sport. On like.

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