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En mer, changement de paradigme pour l’homme libre…

Définition (source Wikipédia) : Un paradigme est — en épistémologie et dans les sciences humaines et sociales – une représentation du monde, une manière de voir les choses, un modèle cohérent du monde qui repose sur un fondement défini (matrice disciplinaire, modèle théorique, courant de pensée).

Ces images ne sont pas récentes (septembre 2017), le constat n’est pas nouveau, mais il est de saison, raison pour laquelle nous avons envie d’y revenir en ce milieu d’été.

Il faut bien comprendre que les mécanismes à l’oeuvre sont récents et rencontrent encore beaucoup d’inertie. Résumons rapidement.

  • Jadis, la mer comme la montagne était un territoire hostile. Après avoir été un instrument de conquête et de commerce, la navigation est devenue un plaisir. On se met alors à aller en mer en bateau à voile, les Anglais inventent le yachting, rares sont les privilégiés.
  • En France, le « nautisme », mot un peu bizarre qui est censé tout résumer mais qui ne désigne rien, connait son réel essor dans les années 60. La voile est une pratique encore accessible, elle se veut populaire, les écoles de voile se multiplient, l’état comme toujours en France joue un rôle moteur. Parfois très positif, quelques fois plus discutable. On fabrique des ports, on structure le littoral (mission Racine en Languedoc Rousillon par exemple) comme on bétonne la montagne (plan neige). La culture est sous contrôle, tout le monde est prié de concevoir la façon d’aller en mer de la même manière. Il en va de même dans d’autres secteurs, c’est la « fédé » et autres structures qui donnent le LA.
  • Le surf fait ses premiers pas dans les esprits grâce aux mots de Jack London. Le Duke Kahanamoku, médaillé olympique de natation en 1912, 1920 et 1924, mais surtout hawaiien, se charge ensuite de porter la bonne parole. A l’orée des années 50, le surf est un des vecteurs de la contre-culture américaine. Séduisant. Il arrive en France dans les années 60, il est mal compris et mal vu.
  • Arriveront plus tard (années 70, 90, 2010 soit grosso modo tous les 20 ans), le windsurf, le kitesurf, le stand up paddle et le foil. L’embarcation, plus petite, toujours, devient…

Aujourd’hui – c’est le propos –  beaucoup de choses ont changé depuis cette fin des années 70 qui vit arriver la « planche ». Elle correspond à la fois à la miniaturisation de l’esquif et l’individualisation de la démarche. Personne n’en prend conscience alors mais c’est tout un modèle sportif qui est en train de connaître ses premières fissures. Le début des sports « libres ». Quelques décades plus tard, il n’y a plus d’un coté la voile, de l’autre la glisse. Peu importe qui va au large, qui reste dans l’Estran. Il est question d’instantanéité, d’accès, de légèreté, de mobilité, de plaisir, de liberté, de facilité, de flexibilité, d’expérience, de partage, d’innovation aussi.

La mer est un tout et la culture maritime est en pleine recomposition. Les imaginaires également. Le surf, le windsurf, le kitesurf, le stand up paddle et en option, leur dénominateur commun le foil (que l’on retrouve aussi en voile) révolutionnent la façon de « prendre la mer » et surtout ne font qu’un finalement tant la transversalité des pratiques est une réalité. C’est l’heure de la figure du »waterman ». Il n’est pas forcément question de performance, elle n’est toutefois pas exclue, mais de sensation, d’une autre forme de conquête aussi. Le large n’a plus le monopole de l’aspirationnel, le figure tutélaire du marin s’estompe, celle du surfer change aussi. On se réapproprie la mer, pas forcément le large, pas uniquement l’Estran.

La grimpe et le trail, pratiques légères, ont révolutionné la montagne. Il en est de même sur l’eau. Ce qui pose le problème de l’évolution de la voile qui reste un exercice fabuleux mais plus généralement de la pratique de la mer et des plans d’eau intérieur. On parle en coulisse d’une forme de convergence entre la voile légère et l’outdoor. On re-discute également de voile légère. Il y a quelques années, personne ne voulait nous écouter à ce sujet. Le groupe Bénéteau rachète des « petits » chantiers. On prend conscience que le 45 pieds habitable n’est peut-être plus un modèle d’avenir. Les temps ont changé. Par ailleurs, le secteur du bateau à moteur, qui représente quand même 70% du marché en France, au bas mot, est en panne d’imagination. On aurait pu penser que l’association du foil (faible trainée et confort) et du moteur électrique, fournirait des idées pour l’avenir, les premiers communiqués de presse pour le salon de Cannes 2019 donnent à voir de la puissance et du luxe. Quel sera le TESLA du secteur ? Tout ceci pose aussi la question des infrastructures imaginées pour un modèle d’après guerre. Les ports sont des installations lourdes, impactantes (béton) pour l’environnement, dans lesquelles, on enferme des bateaux qui ne naviguent jamais ou si peu. Pendant ce temps-là, on limite l’accès aux plages sous couvert de la loi littorale.

C’est quoi un marin en 2050, c’est quoi un « port » en 2050 (ce sera sans doute une nouvelle forme de porte d’accès à la mer, plus ouverte, plus souple, plus polyvalente)…. Autant de questions stratégiques…

Homme libre, toujours tu chériras la mer. Baudelaire aurait aimé la liberté que procure les nouvelles « embarcations » et l’avenir qui se dessine.

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